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Méthanisation : une bonne qualité de l’air mais des odeurs à maîtriser

Les émissions de polluants et nuisances olfactives à proximité des unités de méthanisation soulèvent des inquiétudes de la part des riverains.

Si l’étude Aqametha rassure sur la qualité de l’air, avec des émissions de polluants nettement inférieures aux seuils de référence, elle rappelle que la gestion des odeurs reste un enjeu clé pour la filière de la méthanisation et son intégration dans les territoires.

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La méthanisation connaît un développement spectaculaire en France. Près de 1 500 installations sont aujourd’hui en activité, principalement d’origine agricole, et deux à trois nouvelles unités sont mises en service chaque semaine. Mais cette croissance rapide soulève des inquiétudes, notamment sur la qualité de l’air et les odeurs ressenties par les riverains.

C’est pour répondre à ces préoccupations que le projet AQAMETHA a été mené entre 2020 et 2023 dans le cadre d’un programme de l’Ademe. Coordonné par Atmo France, en partenariat avec six associations agréées de surveillance de la qualité de l’air et le bureau d’études Osmanthe, douze sites représentatifs de la diversité de la filière française ont été étudiés.

L’objectif est double : mesurer les émissions de polluants caractéristiques de la méthanisation (ammoniac et hydrogène sulfuré) et analyser l’impact olfactif grâce à la méthode du « Langage des Nez ». Les campagnes de mesures ont été réalisées en été et en automne, afin de prendre en compte la saisonnalité et ses effets sur la dispersion des polluants.

Des niveaux de pollution très en dessous des seuils

L’étude se veut rassurante. Elle montre que les émissions d’ammoniac (NH₃) et d’hydrogène sulfuré (H₂S) restent très largement inférieures aux valeurs sanitaires de référence. « Les concentrations en NH₃ et H₂S sont les plus élevées en limite de propriété, avec une concentration moyenne respective de 12,5 µg/m³ et de 1 µg/m³ », précise le rapport publié le 4 septembre 2025.

Mais dès les premières habitations, les niveaux chutent nettement : « les concentrations en NH₃ sont divisées par trois, et les concentrations en H₂S sont proches voire en dessous des limites de quantification de l’appareil de mesure ».

Les mesures confirment cette tendance. « Les concentrations hebdomadaires en ammoniac s’échelonnent entre 2 et 78 µg/m³, bien en dessous de la valeur toxicologique de référence de 500 µg/m³ fixée par l’Anses (1) », souligne l’étude. Même constat pour l’hydrogène sulfuré : « les concentrations maximales mesurées en limite de propriété s’échelonnent entre 0,4 (limite de quantification) et 5 µg/m³, et sont bien en dessous de la valeur guide pour prévenir les effets sur la santé fixée par l’OMS (2) à 150 µg/m³ en moyenne sur 24 h ».

Au centre des villages voisins, les valeurs sont comparables à celles enregistrées dans des zones sans méthaniseur, confirmant que l’influence des installations s’estompe rapidement au-delà de leurs proximités immédiates.

Des nuisances olfactives limitées mais concentrées autour des sites

Si les rejets polluants restent très en dessous des seuils sanitaires, c’est sur le terrain des odeurs que les riverains se montrent les plus sensibles. L’étude confirme que les nuisances sont localisées et limitées dans l’espace. « L’emprise odorante de la méthanisation peut se ressentir à une intensité qualifiée de forte dans les premiers 200 mètres autour du site, puis devient modérée à faible entre 200 et 2 000 mètres », indique le rapport.

Les sources principales ont été identifiées : « les secteurs les plus odorants sont les stockages d’intrants solides, en particulier en présence de matières animales, et les trémies extérieures permettant l’alimentation du digesteur ».

L’étude confirme également qu’au-delà de 230 mètres, l’intensité odorante chute rapidement pour devenir faible, ce qui appuie la décision réglementaire interdisant toute construction d’habitation à moins de 200 mètres d’une unité de méthanisation. L’étude souligne néanmoins que la perception des riverains peut varier, en fonction du contexte local et de la sensibilité des populations.

Des marges de progrès pour améliorer l’acceptabilité

Cette étude met en évidence que la méthanisation n’entraîne pas de risques sanitaires majeurs liés à l’air, mais qu’elle génère des nuisances olfactives localisées pouvant attiser les tensions locales et peser sur l’acceptabilité des projets.

Pour répondre à cet enjeu, le rapport formule un ensemble de recommandations concrètes pour aider les exploitants à limiter les nuisances. Parmi elles, la réduction des durées de stockages, la couverture des fosses, l’entretien des systèmes de traitements (biofiltre, cuve à hygiénisation…) ou le nettoyage régulier des sols de l’unité et la gestion des eaux pluviales. Les auteurs insistent également sur la nécessité de limiter les durées d’ouverture des bâtiments de stockage d’intrants et de maîtriser les opérations ponctuelles génératrices d’odeurs telles que les curages.

Enfin, une des clés de l’acceptabilité des méthaniseurs passe par la communication. « Informer en amont la municipalité et/ou les riverains lors d’interventions exceptionnelles susceptibles de générer des odeurs » apparaît comme une condition essentielle pour apaiser les inquiétudes.

(1) Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. (2) Organisation mondiale de la santé.

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